LA SOUS-LOCATION DANS LE BAIL COMMERCIAL
(Cour de cassation - Troisième chambre civile — 18 janvier 2023 - n° 21-22.209)
Une clause du bail précisant les modalités du calcul de l’indemnité d’éviction en cas de sous-location peut-elle être contraignante pour le bailleur ?
Dans cette affaire, La Poste a sous-loué les locaux commerciaux une année après le début du bail sans en informer le bailleur. Six ans plus tard, le bailleur a donné congé au locataire pour procéder à la reconstruction de l’immeuble et offert une indemnité d’éviction.
Le bailleur est notifié de l’existence de cette sous-location et assigné par son locataire en paiement d’une indemnité d’éviction. Une clause du bail en dérogation à l’article L.145-31 du code de commerce prévoyait qu’en cas de sous-location, le bailleur sera appelé à intervenir à l’acte et qu’en cas de sous-location à une société du groupe LA POSTE, le bailleur renoncerait d’ores et déjà à intervenir à l’acte de sous-location. Le preneur devrait cependant lui notifier une copie de cet acte contre signature avec accusé de réception pour information.
La cour d’appel condamne le bailleur au paiement de cette indemnité d’éviction au motif que le congé a ouvert, au profit du locataire, le droit à une indemnité d’éviction et que le bailleur ne pouvait se prévaloir d’une quelconque irrégularité pour refuser à son locataire, le droit à une indemnité d’éviction au motif que la copie du contrat de sous-location ne lui aurait été transmise que six ans après sa signature.
Elle relève que le fait que les locaux aient été donnés en sous-location totale, faisait subir un préjudice direct et personnel à la sous-locataire du fait de l’éviction limitée en principe à la valeur du droit au bail.
La Cour de cassation confirme d’abord l’opposabilité de la sous-location au bailleur conformément aux prévisions du bail commercial.
Elle confirme étonnamment, dans un second temps, que l’indemnité d’éviction du preneur conformément à la clause du bail serait calculée en fonction des caractéristiques d’exploitation du sous locataire et devrait être d’un montant suffisant pour lui permettre d’indemniser le sous-locataire du préjudice subi par ce dernier en raison du non-renouvellement du bail. Pour elle, la clause du contrat du bail, qui précise les modalités de calcul de l’indemnité d’éviction due au preneur, n’avait pas pour objet le priver de l’indemnisation de son préjudice et elle ne venait pas davantage le limiter puisqu’il ne s’agissait pas d’une indemnisation forfaitaire.
Que retenir de cet arrêt ? Une importance particulière doit être de mise lors de la rédaction des clauses contractuelles dans le bail commercial. Le sous-locataire normalement tiers au bail commercial peut toujours avoir le bénéfice d’une indemnité d’éviction par une clause mal rédigée ou mal structurée comme le démontre cet arrêt.
Prenez donc soin de rédiger vos clauses avec vigilance ou faîtes appel à un professionnel !