ABSENCE DE DROIT DE PREEMPTION DU LOCATAIRE EN CAS DE VENTE D'IMMEUBLE A USAGE INDUSTRIEL
Cass. civ. 3ème, 29 juin 2023, n° 22-16.034
En matière d’immobilier d’entreprise, lorsque le propriétaire envisage de vendre un immeuble ou un ensemble immobilier qui est donné à bail, celui-ci doit en principe notifier sa volonté de vendre pour que le locataire puisse user de son droit de préemption. En effet, le locataire dispose d’un délai d’un mois pour notifier au propriétaire sa volonté d’acheter. Une fois l’acceptation donnée par le locataire, les parties devront procéder à la vente dans un délai de 2 mois. Toutefois, une question reste en suspens.
Le Preneur à bail d’un local à usage industriel peut-il préempter en cas de vente du local par le propriétaire ?
Une dizaine d’années après avoir donné à bail commercial un ensemble immobilier à une société Preneuse, le propriétaire a décidé de mettre en vente l’ensemble au profit d’une société tierce acquéreuse. Mécontent de la situation, le Preneur a assigné le propriétaire en annulation de la vente au motif d’une atteinte à son droit de préemption en sa qualité de locataire.
Pour justifier sa demande d’annulation de la vente, le Preneur se prévaut de l’application de l’article L145-46-1 du code de commerce qui prévoit un droit de préemption du locataire en cas de vente d’un « local à usage commercial ou artisanal ». Après avoir vu sa demande rejetée par la Cour d’appel, le Preneur a formé un pourvoi en cassation.
A la question du droit de préemption du Preneur d’un local à usage industriel, les juges répondent qu’à la lecture du contenu de l’article L145-46-1, « les locaux à usage industriel se trouvent exclus du champ d’application de ce texte ». Le problème qui survient alors est celui de la définition du terme de local à usage industriel.
En l’absence de définition réglementaires ou législative, la cour de cassation vient combler ce vide juridique et définit la notion de local à usage industriel comme « tout local principalement affecté à l'exercice d'une activité qui concourt directement à la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers et pour laquelle le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant ». Par le terme de principalement affecté, il faut en déduire que même si le locataire exerce une activité commerciale, si celle-ci n’est qu’accessoire, elle ne pourra justifier la mise en œuvre du droit de préemption. En l’espèce, le locataire exerçait une activité de négoce à hauteur d’un tiers de son activité globale. La cour de cassation n’a retenu que l’activité industrielle qui était prépondérante dans la société.
A retenir de cet arrêt : Cette décision est d’une grande portée puisqu’elle permet de lever tous les doutes qu’il pouvait y avoir quant au droit de préemption du locataire d’un immeuble à usage industriel. Par cet arrêt, la cour écarte non seulement l’application de l’article L145-46-1 du code de commerce aux locaux à usage industriel, mais elle en définit également le contenu.